Les aventures de Françouais



Chapitre 2 - Promenade du matin chagrin


 
 

ALBERT DUGLARD avait le droit par décret caravanesque à 5 heures de pause toutes les semaines. Il avait soigneusement dit au revoir à Micheline qui pleurait toutes les larmes de son corps tant elle était triste que son doudou l’abandonne dans sa caravane pourrave.

Il avait envie de se reposer dans un coin tranquille et il marchait les mains dans les poches en direction du premier bled venu. De temps à autre il foutait des coups de pompe dans les canettes vides qui décoraient le bord de la route. Le temps de balancer çà et là quelques mollards bien verdâtres, il arriva aux portes de Saint Saturnin les Bains.

Des plaques de bouse collées sur le panneau indicateur donnaient une couleur très spécifique au village. Albert ne le sut pas mais c’était fiston qui quelques jours auparavant à cet endroit avait organisé un concours international de pets de vache. Albert se prit quelques merdes de pigeons sur la gueule avant de dénicher un endroit pour s’abriter. Ces salopards de volatiles pour protester contre les braconniers canonnaient à guano rouge les étrangers du bled. Albert se cassa les dents à la porte de la cabane à chiote du père Bazzzin ce vieillard acariâtre qui était à l’intérieur en train de poser sa pêche.

- Sacré d’vingt nom di dioux d’bondidioux d’cré vingt dix dioux, qui c’est ?

- Le père fouettard répondit-il de sa plus douce voix histoire d’éviter que l’autre furibard ne déboule hors de son chiotard pour le bastonner à grand coup de canne dans les couilles.

Albert n’avait que comme ultime recours avant de ressembler à un rocher Breton, de se réfugier dans le troquet du bled. Il hésita longuement devant la tête des rustauds qui le dévisageaient de l’intérieur. En recevant une nouvelle salve de guano, il se décida à rentrer.

- Bjour Messieurs lança-t-il en ne regardant personne histoire de ne froisser quiconque.

- Kéke j’vous sert, demanda le barman sans même répondre à la salutation et qui regardait par-dessus son épaule.

- Un gin fizz avec trois glaçons demanda Albert fort gêné.

- Y’en n’a pas, on n’est pas des lopettes ici on ne boit pas ce genre de mixture, vous ne voulez pas non plus que je fasse des sodas sans alcool ?

- Un whisky coca light avec un zeste de citron.

- C’est plus l’heure, on ne sert plus à manger.

- Euh, un bloody mary demanda Albert tout hésitant.

- Qu’est-ce que vous racontez comme salades ? Vous avez eu un accident sur l’autoroute ? vous êtes resté trop longtemps au soleil ? Tenez je vais vos servir une bonne boisson bien de chez nous : un pastaga et tout ira mieux. Ne vous inquiétez pas.

Albert grimaça car il avait horreur du pastaga mais il comprit rapidement que s’il déclinait l’offre du patron, il risquait la lapidation sur le champ. On lui servit un truc infâme tant c’était fort. Il rajoutait de la flotte mais c’était toujours aussi fort et tous les péquenauds le dévisageaient de la même façon.

Le patron s’en enfila une rasade directement au goulot, il carburait au pur jus depuis belle lurette et le liquide lui servait de calmant pour sa dent creuse. Il avait l’air de se régaler et s’en balança une autre rasade avant de reposer la boutanche.

- Alors elle est bonne la réserve du père Cadou ? C’est du pastaga de braconnage, mon grand père s’en servait pour mettre dans la lampe à huile et comme après rasage.

Albert avait trop mal au cul pour prononcer la moindre parole. Il s’accrochait au comptoir pour ne pas se viander lamentablement la gueule dans le crachoir recouvert d’une épaisse couche de moisissure verdâtre. Il avait l’impression que ses quenottes se déchaussaient les unes après les autres. Des vagues invisibles submergeaient son esprit et il commença à voir sa vie défiler jusqu’au moment ou il se prit une superbe bourrade sur l’épaule.

- Ben alors, faut rester avec nous. C’est pas une boisson de filles certes mais c’est pas un truc trop fort non plus.

Albert opina du chef alors que de grosses goûtes de sueur coulaient sur son front. Pour montrer qu’il faisait copain copain avec les glaudes, il se re-balança une rasade de tue mouche derrière le cornet. L’effet fut pire encore et sa vue se brouilla. Il sentit un truc humide et visqueux filer entre ses fesses. Albert déposa son godet et se dirigea les yeux fermés en direction des chiotards. Il ne connaissait pas les lieux mais en reniflant pouvait aisément s’apercevoir de la direction a prendre.

Il se prit deux pots de fleurs dans la gueule avant de s’éclater sur la porte des chiotards. Il ouvrit péniblement la porte et entendit des bruits d’eau. Fiston jouait gentillettement avec son seau et sa pelle dans le troisième urinoir. Albert eut un terrible haut de cœur et gerba tripes et boyaux. L’intégralité de son délicieux repas se fracassa sur la tronche de fiston tout heureux de pouvoir jouer avec un nouveau copain. Albert tomba à genoux, reprit sa respiration et re-balança une nouvelle salve puante. Il eut à un moment façon marlin, l’impression qu’il avait dégueulé son estomac tant la douleur était forte.

Albert retrouva ses esprits alors que fiston l’arrosait avec le contenu des urinoirs bouchés depuis des lustres. Il retrouva la vue et les objets l’entourant devinrent moins flous. Devant lui, une vision d’horreur le cloua, il y avait du dégueuli maronnasse absolument partout. Fiston qui avait retiré ses lunettes avait de superbes marques. Albert se rendit alors compte qu’il y avait du dégât aussi au niveau de son calbutte. Il s’escrima de longues minutes durant pour l’ôter sans se fracasser la gueule dans cette patinoire improvisée. Il se torcha le cul avec et renfila son falzar avant de balancer son calebutte maculé de fientes puantes que fiston chopa au passage.

Fiston en rigolant comme un gros naze se foutu le calebutte sur la tête et paraissait parfaitement heureux. Albert frissonna d’effroi et commença sérieusement à se poser la question de savoir s’il avait bien fait de s’arrêter dans ce bled.

Les glaudes dans la salle se bidonnaient comme de gros connards, certains en avaient le nez qui coule. Le vieil Edgard faillit pisser dans son futal et se précipita vers le premier pot de fleur pour se soulager ce qui attisa la bonne humeur générale.

Albert la peur au ventre et le cul tout propre rejoint ses nouveaux potes.

- Moi z’ai un nouveau copain, moi z’ai un nouveau copain hurla Fiston en enfilant le pas d’Albert.

Fiston avait une dégaine à coucher dehors avec sa pelle et son seau dans les mains, le calebutte verdâtre sur la tronche et des traces de vomissure dans toutes les entournures. Les glaudes redoublèrent leurs rires et certains qui s’étranglaient s’écroulèrent sur place. Fort heureux d’être la vedette incontestable du jour, Fiston balança quelques grosses caisses d’un volume sonore qu’on lui interdisait d’ordinaire. Les glaudes se roulaient par terre en se touchant les parties génitales. Fiston exultait et montra son sguegue qu’il décalotta à plusieurs reprises histoire de se rincer le gland dans les verres qui n’étaient pas à sec.

Une vieille lopette sur le retour tenta de le piper avec le doux parfum d’alcool mais fut rejeté par la putréfaction que dégageait fiston en faction. En effet le fait de jouer à longueur de journées dans les chiotes à se prendre des glaviots, de la gerbe et autres trucs bien crades au travers de la gueule faisait que fiston ne dégorgerait pas de sitôt à moins de tomber sur un gros pervers, le poireau.

Albert qui se déplaçait comme un vieillard sentit que les forces lui manqueraient pour rejoindre la caravane, son petit nid chaud et douillet du moment, s’accouda de nouveau au comptoir. Miraculeusement le contenu du godet ne lui paraissait plus aussi immonde. Il était sevré !

- J’vous en ressert une larmichette ? Je n’ai pas pu résister durant votre absence, j’ai terminé votre verre direct.

- Allez, en v’la un que les Goudriollais n’auront pas.

Les rires se calmèrent pour laisser place à de l’admiration, l’étranger n’était pas si étranger que cela car comme le Saint Saturnois, il avait la haine du Goudriollais. Les glaudes se relevèrent avec de la sciure et des mégots de clope collés aux vêtements. Ils levèrent tous en chœur leur verre.

- A mort les Goudriollais dirent-ils tous solennellement. Puis ils descendirent le contenu et le barman fut obligé de quitter son antre pour resservir tout le monde.

Albert qui avait prit goût à la niasque liquida son verre en trinquant aussi à la mort des Goudriollais. Il adorait le cru local, il adorait cette région et il aurait voulu être né dans la caravane de Micheline.

La suite ne fut que beuverie et philosophie de comptoir. Tous avaient leur mot à dire sur n’importe quel sujet. Comme s cela ne suffisait pas déjà, un fond sonore de télé abreuvait les tympans et de nouveaux sujets fusaient chaque minute.

Puis vint le moment ou tout le monde se mit à se parler sans se comprendre, le tout entre coupé de rires bien gras. Plus personne ne se souciait d’Albert, mais se souciait plutôt d’être à temps au rendez-vous de la tournée suivante.

Lorsque la réserve du patron fut vidée, quelqu’un proposa d’aller dehors faire un foot. Ils se retrouvèrent à moitié dépenaillés dehors à chercher bêtement quelque chose dans quoi shooter.

Les volatiles reprirent leur balai le temps au patron d’aller chercher sa pétoire pour en dézinguer quelques uns. Quelques vitraux d’église cassés plus tard, les bestioles continuaient toujours leur manège.

Quelques glaudes touchés et coulés s’écroulèrent sur le sol ce qui laissait entrevoir un grand spectacle bien classique au sein des rues de Saint Saturnin les Bains.

La porte de la cabane du père Bazzzin ce vieillard acariâtre s’ouvrit :

- Vingt dix dioux, j’ai loupé quelque chose ?

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